Le meilleur choix du slow : l’agriculture doit être paysanne
La conjoncture des événements liés au mouvement de la lutte paysanne en France, invite chacun de nous à s’interroger sur l’avenir du monde agricole. Notre existence se base sur un unique pivot. Qu’importe l’époque, la religion, la culture, la tendance politique, le pays, le territoire, le genre ou l’identité. Bien qu’il y ait eu des peuples chasseurs cueilleurs, sans l’agriculture il n’y aurait pas de civilisation possible à notre échelle contemporaine. En quoi ce que nous consommons à notre tablée est-il la clef de voûte du fondement même de nos sociétés ? Ainsi sur le plan architectural, une clef de voûte sert littéralement à maintenir les autres pierres. Et notre choix de développement agricole est central pour la réussite ou l’échec de nos multiples communautés.
« Dis-moi ce que tu manges, je te dirai ce que tu es »
– Jean Anthelme Brillat-Savarin
L’agriculture paysanne pour résoudre les maux de la planète



Si le destin de nos sociétés est inexorablement lié à ce que nous décidons de cultiver, l’effet papillon d’une politique agricole paysanne résoudra de nombreux maux. En effet, favoriser une agriculture paysanne est sans conteste le choix d’un développement vertueux des territoires. Ainsi il s’agit de promouvoir une agriculture respectueuse et à taille humaine dans sa productivité et ses rendements. De plus l’agriculture paysanne est respectueuse de l’environnement naturel. Quant à l’agriculture industrielle, elle impacte de façon néfaste et irréversible le devenir des écosystèmes. Désormais les conséquences dramatiques d’une agriculture intensive sur l’environnement ne peuvent plus être niées. Et les dégâts engendrés sont parfois irréparables.
Il est certain que les diverses pollutions liées à l’agro-industrie nuisent à la santé du vivant. Afin d’assurer la préservation des territoires, le modèle à préconiser s’élabore par un modèle agricole durable et responsable. Il s’agit d’une décision principalement politique qui engage la survie des générations futures.
L’agriculture paysanne : une conviction personnelle et professionnelle
J’ai grandi et passé une majeure partie de ma vie dans le monde rural. D’ailleurs, alors que je n’étais encore que lycéenne, j’ai participé aux mouvements défenseurs de la paysannerie. Et depuis plus de vingt ans, j’œuvre par mon métier à sensibiliser à une autre manière de voyager à travers les territoires. Il s’agit d’un travail d’ingénierie en développement territorial durable et éco-sensible pour mettre en lumière les dynamiques locales. À mon échelle, isolée actuellement dans une lointaine contrée de la Corse Orientale, j’encourage et je soutiens avec force le mouvement des agriculteurs français. Par-delà la lutte, je suis convaincue que la défense d’une agriculture paysanne dessine un avenir de paix et de sécurité pour la planète.
Persister à vouloir faire basculer le monde rural dans ce qui le sied le mieux, la paysannerie, sera sans nul doute garant d’une société vertueuse.
L’état d’esprit du slowtourisme puise originellement son existence dans la fervente considération d’une agriculture paysanne. Ainsi, privilégier une alimentation par les circuits-courts et le respect des saisons est un axe majeur pour voyager slow.
Quel lien entre l’agriculture et le slowtourisme ?

Depuis les années 1980, il y a une résurgence à privilégier une alimentation de qualité. Ce qui induit d’avoir une agriculture de qualité pour favoriser la production d’aliments savoureux. Ces mouvements de préservation de la gastronomie locale sont apparus en Italie et en France, deux pays où la gastronomie est très ancrée culturellement. Ainsi, des foules visionnaires d’un monde durable et engagées pour les générations futures, se sont soulevées à de nombreuses reprises. Apparu dans les années 2000, le slowtourisme propose d’aller vers la rencontre authentique d’un territoire lors de nos voyages. Mais au-delà d’une approche éco-responsable des vacances, il s’agit un état d’esprit territorial.
Véritable contre-pied au tourisme de masse, le voyage écologique tend à minimiser notre impact sur l’environnement. Ainsi c’est une nouvelle mise en lumière de notre regard sur les paysages, la biodiversité et les dynamiques locales. Le mouvement slow nous amène à vivre de nouvelles expériences immersives et gustatives. Voyager n’est finalement plus une question de distance kilométrique mais de ressenti avec le territoire visité ! Alors il s’agit de réinventer une vision du tourisme et de s’accorder le temps d’un séjour l’exploration de terroirs aux mille et une facettes sensorielles.
ll était une fois en Italie, la naissance d’un mouvement
Il était une fois, dans les années 1980 dans la région du Piémont italien, l’existence d’un réseau de fins gourmets paysans. Ces œno-gastronomes étaient tous très amoureux des produits locaux et de saison. Ils soutenaient que les produits locaux issus d’une agriculture locale et respectueuse, garantissaient de délicieux mets. Ensemble, il se réunissaient et ils renforçaient leurs convictions de l’art de la table. Lorsqu’en 1986 dans le cœur historique de Rome s’implanta un Mac Donald, ce collectif de savants épicuriens firent traversés par un grand effroi. Et ils eurent une vision claire et précise de l’impact néfaste du fast-food sur le devenir de la gastronomie et l’agriculture. Ils étaient conscients qu’à terme, la malbouffe nuiraient effroyablement au bien de l’humanité.
Par ailleurs, le développement des chaines de fast-food serait la source d’un terrible déséquilibre pour la société. Ils entrevoyaient déjà les conséquences irréversibles sur les sols, les nappes phréatiques, la santé des populations, et l’appauvrissement des saveurs. Alors ce réseau éleva sa voix. Il devint militant et contestataire.
La naissance de la Slow Food !
Ainsi pour contester et s’opposer à l’arrivée de la malbouffe, ils décidèrent de nommer leur mouvement Slow Food. Une forme de protestation à un géant de l’industrie agroalimentaire qui s’apprêtait à appauvrir le circuit de l’alimentation à bien des égards. Puis, l’histoire se poursuvit en 1989 à Paris, où ces activistes amoureux du goût, firent le choix de fonder un mouvement international d’oeno-gastronomes. Le mouvement de la Slow Food ne cessera de s’étendre à l’échelle mondiale. La Slow Food soutiendra des valeurs telles que la sauvegarde de la biodiversité, la préservation de l’environnement et la juste rémunération des producteurs. Des valeurs essentielles qui font sens et écho à tant de territoires et d’acteurs engagés pour une alimentation de qualité.
Le mouvement du Slow Food n’a cessé d’évoluer, influençant ainsi d’autres secteurs d’activités, jusqu’à créer un réel mouvement slow. Donc il existe aujourd’hui des domaines tels que la Slow Life, la Slow Cosmétique, la Slow Money, le Slow Parenting, les Slow Cities, ou bien encore le Slow Travel. C’est donc sur des valeurs engagées pour préserver les territoires et ses acteurs, que le slowtourisme développe sa philosophie. Bref, c’est une histoire qui part de la volonté d’avoir une belle tablée gourmande composée de produits locaux issus du circuit court !
L’agriculture paysanne, la clef d’un monde vertueux

En réalité, tout part de l’assiette. Ou de ce que nous décidons de mettre dans notre panier alimentaire. Souvenez-vous du mouvement pour défendre la paysannerie en France à la fin des années 1990. À la tête de ce soulèvement pour s’indigner de la construction d’un MacDonald’s à Millau, José Bové. Ce mouvement contestataire était suivi par 300 agriculteurs, organisé par la Confédération Paysanne et le Syndicat des producteurs de lait de brebis. Le démontage du McDonald’s de Millau aura lieu le 12 août 1999 par des paysans militants et il constituera un repère de l’altermondialisme en France. Et d’après le sociologue Jean-Pierre Poulain, cette action fait par ailleurs entrer la nourriture sur la scène politique en France.
Démocratiser l’agriculture et l’alimentation, une affaire collective
Les politiques et les territoires doivent œuvrer en conscience pour mener le développement solide d’une agriculture paysanne. Il s’agit de réaliser une véritable travail de développement territorial dont les fondements respectent le vivant. Un chantier de taille qui ne peut que se concevoir par une élaboration collective et coopérative. Cependant un tel projet n’est pas impossible à réaliser à court terme. De nombreuses solutions existent, et de multiples acteurs du territoire ont conçus des modèles accessibles. Et nous soulignerons qu’une agriculture paysanne est le symbole fort d’une démocratie !
Vers la résilience alimentaire des territoires
Imaginons un projet national qui se développe à l’échelle locale, telle que celle des communautés de communes. ll s’agirait d’une œuvre collective nationale qui se développerait à taille humaine. Et dans ce monde globalisé, c’est à taille humaine que les sociétés avanceront vers des dynamiques territoriales vertueuses. Le renforcement et le développement d’une agriculture locale de qualité sous entend aussi de nombreux enjeux. Dès lors, il existe depuis 2016 le Projet Alimentaire de Territoire qui a pour objectif de fédérer les différents acteurs d’un territoire autour de la question de l’alimentation. Et d’assurer des objectifs qui permettent d’atteindre la résilience alimentaire.
En terme d’enjeux principaux, il s’agit par exemple de :
- Valoriser et à protéger un patrimoine : préserver le foncier agricole, maintenir la fonctionnalité des exploitations agricoles, soutenir les projets d’installation agricoles ;
- Maintenir la vitalité de l’écosystème alimentaire : soutenir la structuration de l’ensemble des filières d’un territoire, les opérateurs des filières, de dynamiser un pôle alimentaire vers une dynamique collective de mutualisation, promouvoir les productions locales ;
- Soutenir l’alimentation comme vecteur de lien : faciliter l’accès physique à une alimentation de qualité, sensibiliser les habitants à l’alimentation durable, et aux productions locale, accompagner les publics les plus précaires pour l’accès à une alimentation de qualité, etc.
La résilience alimentaire des territoires est un développement incontournable pour l’avenir durable de nos sociétés. L’impact vertueux de mener une telle politique agricole garantit d’avoir d’heureuses retombées sur la plan sociétal, social, économique, environnemental. Il est grand temps de mettre le petits plats dans les grands et d’agir en faveur d’une agriculture paysanne pour tous ! Car l’agriculture sera paysanne ou ne sera pas !




